Textes primés les années précédentes



Concours 2019

Prix Hans Karl Abel décerné à l'Ehpad Loewel de Munster.

Le Noël de Jeangala

 

Dans une vallée, aussi lointaine que merveilleuse, la famille Hoeffelbarth se préparait à fêter Noël dans une ambiance festive. Toute la famille serait bientôt réunie et les préparatifs se faisaient dans une bonne humeur baignée par des odeurs mélangées de brédalas et de vin chaud. Cela faisait maintenant plusieurs jours qu’il ne cessait de neiger et à ce rythme-là, au vingt-cinq décembre, on ne verrait plus de la demeure que le bout de la cheminée.

A l’aurore du vingt-quatre, le ciel, d’une belle couleur rosée, laissait présager une journée ensoleillée. Il n’était pas encore neuf heures que les quatre enfants de la famille étaient déjà dehors à courir entre glissades en luges, batailles de boules de neige et création d’un bonhomme de neige géant. On entendait au loin leurs rires et cris joyeux ; mais à force de vouloir aller toujours plus vite avec leur luge, et malgré toutes les recommandations de leur mère de bien faire attention, arriva ce qu’il devait arriver, un accident.

C’était évidement Jeangala, le plus intrépide des quatre de la fratrie, qui vit sa course effrénée stoppée net par un sapin. Pour ne pas inquiéter leur mère, les trois frères et sœurs le transportèrent comme ils purent jusqu’à son lit où il resta immobile. A midi, Jeangala dû prétexter une grosse fièvre pour être exempté due repas, mais il était au plus mal. Madame et monsieur Hoeffelbarth, voyant qu’un de leurs enfants ne serait jamais rétabli pour le soir, se demandèrent comment fêter Noël ensemble. Ils pensèrent que la solution pour réunir tout le monde serait que la fête se déroule dans la chambre de Jeangala. Madame eut une idée : ils allaient remplacer le traditionnel repas de Noël par un pique-nique de noël dans sa chambre. Le temps de prévenir les convives du changement d’organisation que madame Hoeffelbarth était déjà repartie dans sa cuisine pour les multiples préparatifs que tous ces changements demandaient. Elle n’avait évidement pas oublié de leur demander, au passage, s’ils pouvaient ramener de quoi égayer la chambre car celle -ci n’était évidement pas décorée aux couleurs de Noël.

 

Dix-neuf heures pile. Les premières sonneries retentirent. Rapidement la famille fut au complet et chacun avait respecté la demande de venir avec un petit objet de décoration. Parmi les présents il y avait un ange que l’on a suspendu au plafond et qui semblait veiller sur la famille ; un bonhomme de neige lumineux qui clignotait au son de « Vive le vent » ; un lutin qui trouva sa place sur le rebord de la fenêtre et un manala en peluche que Jeangala voulu dans son lit sans plus attendre.

La soirée passa vite et se termina par les traditionnels brédalas dont chacun était friand, accompagnés d’un verre de vin chaud dont la recette ancestrale était héritée de l’arrière- grand-mère de monsieur, cuisinière émérite. Ce soir-là pour ne pas laisser Jeangala seul, et pour la première fois, il y eu un Noël sans messe chez les Hoeffelbarth. C’est chacun dans leur lit, qu’ils s’endormirent au son des cloches qui sonnaient minuit.

A ce même moment, la magie de Noël opéra. L’ange, le bonhomme de neige, le lutin et le manala s’animèrent comme par enchantement. Ils furent d’abord surpris de se retrouver dans la chambre d’un enfant et non pas dans un salon ou une salle à manger et quand ils comprirent que celui-ci était comme « en miette », ils proposèrent des solutions pour le guérir.

C’est l’ange qui le premier prit la parole : » je pense que nous devrions tous prier pour lui, Dieu m’a toujours entendu, il fera quelque chose, c’est sûr ». ce qui est sûr, c’est qu’il affirmait cela avec force et conviction ! le bonhomme de neige proposa de le guérir grâce à des sortes de cataplasmes froids réalisés à l’aide de boules de neige et dont lui seul était capable. Le lutin était déjà en train de charger chacun de lui ramener un ingrédient pour la confection d’une potion magique. Quant au manala, il voulait que ce drôle de groupe se réunisse pour la « danse de la guérison ». S’en suivi une bataille mémorable pour savoir quelle idée serait retenue.

Il fallut tout de même un bon moment à ces quatre - là pour finir par se mettre d’accord : on tenterait tout ; ainsi fut fait et le bonhomme de neige appliqua ses cataplasmes pendant que le manala et l’ange aidèrent le lutin à élaborer sa potion. Puis, ils firent boire à Jeangala ladite potion. Ensuite ils se réunirent tous pour une danse de la guérison avant de terminer la nuit dans le silence de la prière. Tout ce petit monde était sans doute encore en train de prier lorsque Jeangala ouvrit les yeux au matin du vingt-cinq.

Il réveilla frères, sœurs, cousins et cousines avant de dévaler l’escalier jusqu’au sapin. Si tout le monde était étonné de le voir en si bonne forme, personne n’osa le montrer. Tout ce chari vari réveilla les adultes et la famille se retrouva au salon, autour du sapin. C’est de là qu’un doux bruit, mélange de papier cadeau déchiré et de chants de Noël s’élevait. Au milieu de cette harmonie, la voix de Madame Hoeffelbarth retentie du haut de l’escalier : « Jeangala, mais qu’est ce qui s’est passé dans ta chambre ? C’est un vrai champ de bataille ! »

 

FIN


Concours 2019.

Prix Charles Perrault décerné à Catherine Auberger de  Les Clayes-Sous- Bois dans les Yvelines.

 

Un peu de bois

 Une fois, l’hiver fut plus froid que tous les hivers auparavant. Le ciel fut plus sombre, la terre plus dure ; les branches des arbres transparentes de gel se cassaient avec des bruits de verre. Dehors, les enfants pleuraient des larmes de glace, la peau gerçait, les lèvres se fendaient. L’eau devint rare, les gens cessèrent de laver leur linge puis ils cessèrent de se laver.

 

 Autrefois une belle forêt entourait le village, elle protégeait du vent, abritait les oiseaux et fournissait du bois. Pour se chauffer, chaque hiver on sacrifiait des arbres sans compter. Cet hiver-là il ne restait plus que deux gros chênes. Le vent hostile se faufilait dans les rues du village, s’infiltrait dans les moindres interstices, glaçait les maisons et les hommes. Les derniers chênes furent abattus, les derniers oiseaux disparurent, chacun fit du feu, se réchauffa du mieux qu’il put. On se mit à habiter les uns chez les autres, à regrouper les familles pour se tenir un peu plus chaud. Au fil des jours, le bois vint à manquer, la nourriture gelée devint immangeable et dès que l’on cessait de bouger, le cœur ralentissait, le sang durcissait dans les veines. Petit à petit, les gens ne firent plus que dormir. On se décida alors à demander de l’aide au château. Là-bas, les grosses cheminées crachaient encore de belles fumées ; du village, on regardait avec envie ces torsades grises qui montaient dans le ciel blanc… Un jeune homme se proposa. Comme il n’avait plus de famille tout le village fut d’accord : il ne manquerait à personne s’il lui arrivait malheur en chemin. Seul jusqu’à la demeure du Roi, sur une route couverte de givre et de neige, il lui faudrait affronter les rafales glacées du vent. Il s’appelait Sirki.

 

 Depuis longtemps déjà, le Roi et la Princesse Hermine ne sortaient plus mais à l’abri entre les murs épais de leur château, rassemblés devant la belle cheminée, ils étaient bien .

 

 Après une matinée de marche, le jeune Sirki frappa à la grande porte du château : « Ouvrez-moi ! Ouvrez-moi ! Donnez-nous un peu de bois ! » La porte ne s’ouvrit pas. Le Roi remit une grosse bûche dans son feu et s’endormit à la chaleur des flammes.

 Le lendemain le jeune homme revint et supplia :« Ouvrez-moi ! Ouvrez-moi ! Donnez-nous un peu de bois ! » La porte ne s’ouvrit pas. Le Roi ne répondit rien, mais la princesse se pencha par la petite fenêtre de sa chambre et regarda qui frappait ainsi. Vite, elle referma. Dehors il faisait si froid !

 Au troisième jour il n’y avait plus qu’une seule cheminée du château qui fumait encore. « Ouvrez-moi ! Ouvrez-moi ! Donnez-nous un peu de bois ! » La porte ne s’ouvrit pas.

 Tous les matins le jeune homme revenait frapper au château. Il était de plus en plus pâle, de plus en plus frêle. « Ouvrez-moi ! Ouvrez-moi ! Donnez-nous un peu de bois ! » La porte ne s’ouvrait pas. Le Roi ne répondait jamais. Mais un jour derrière la porte d’entrée, il entendit chuchoter : « C’est moi, la princesse Hermine ! Quel est ton nom jeune homme ?

– Je m’appelle Sirki, et je voudrais un peu de bois pour le village. Nous avons froid. Si froid ! »  La blonde princesse entrouvrit la porte et trouva Sirki très courageux et très beau avec ses cheveux longs comme la crinière de son plus beau cheval, ses yeux brillants comme les perles de ses bagues et son corps mince et fin comme la chaîne de son collier. Elle supplia le Roi son père de le laisser entrer au château et de lui donner un peu de bois. Le Roi refusa.

 Tous les matins, Sirki revenait. En cachette de son père, la princesse sortait pour voir le beau jeune homme. De sa main tiède, elle réchauffait ses joues glacées.

 

 C’est ainsi que naquit leur amour.

 

 Chaque jour plus maigre, chaque jour plus faible Sirki continuait à venir : « Ouvrez-moi ! Ouvrez-moi ! Donnez-nous un peu de bois ! » Et, sans se faire remarquer du Roi, la princesse enveloppée de fourrure sortait pour le réchauffer un peu.

 Chaque jour elle suppliait son père de laisser entrer le jeune homme, chaque jour le Roi refusait « Que ce gueux s’en aille ailleurs chercher son bois ! »  Vint un matin où le Roi mit au feu sa dernière bûche. Trois jours plus tard les murs du château enfermèrent la famille royale dans une prison de givre. On n’entendit plus aucun bruit. Plus aucune fumée ne sortit des grosses cheminées. Le village sombra dans le désespoir : Le Roi non plus n’avait plus de bois ! Sirki se rendit une dernière fois au château, la princesse ne répondit pas à son appel.

 

 Au village, la plupart des familles s’étaient endormies dans des cocons de glace et de neige, comme mortes. Les quelques personnes encore debout décidèrent qu’il fallait chercher une forêt où trouver du bois pour faire le feu, ou un rayon de soleil pour réchauffer les corps.

 Puisqu’il avait échoué auprès du Roi, on envoya encore Sirki et on désigna un tout jeune homme grand et vigoureux pour l’accompagner. Ils furent ainsi deux garçons à quitter le village. On les regarda partir sachant qu’on les voyait sans doute pour la dernière fois ; le froid était si grand, ils étaient si maigres. Pour leur voyage on leur donna les deux pots de confiture qu’il restait. Sirki se retourna : la sombre silhouette du château luisait dans la glace implacable et obstinée. Il reviendrait sain et sauf, il reviendrait pour son village et pour Hermine et il apporterait les plus belles bûches au château, pour la réchauffer !

 

 Trois jours et trois nuits les garçons marchèrent sans voir aucun arbre. Le sol dur, glissant, tintait sous leurs pas, des plaies s’ouvraient sous leurs pieds fatigués ; de leurs lèvres fendues, de leurs joues craquelées le sang ne coulait pas, gelait aussitôt, leurs yeux presque aveugles étaient durs comme des cailloux. La hache et la scie qu’ils portaient pesaient de plus en plus lourd.

La faim leur faisait voir des mirages… des loups, des diables, des araignées géantes ou au contraire des anges, des fleurs des champs, des libellules… Mais ils continuaient. Ils marchaient, épuisés. Quel chemin feraient-ils encore ?

 

 « Enfants ! Mes enfants ! Par ici ! » Toute faible, une voix tremblante traversa le froid. Au creux d’un rocher gris un vieil homme engoncé dans plusieurs manteaux de fourrure et dont les cheveux transparents sortaient d’un bonnet troué balbutiait « Enfants ! Mes enfants ! Je meurs ! J’ai perdu mes mains et mes pieds ! Gelés !Je ne peux plus bouger, aidez-moi ! »  « Ce vieillard est un cadeau du ciel, avec tous ses manteaux ! Il nous sauve ! Il est si vieux il a au moins cent ans, il a déjà tant vécu qu’il peut bien mourir ! Nous, nous sommes jeunes, si nous nous partageons ses manteaux de fourrure nous tiendrons plus longtemps dans ce froid mortel. Prenons-les vite et continuons notre route ! dit le plus jeune.

– Honte à toi ! siffla Sirki. Et il se tourna vers le vieil homme :

– Nous cherchons du bois pour faire du feu ou du soleil pour réchauffer les corps. Si nous en trouvons tu en profiteras avec nous Grand-Père ! Sinon, nous mourrons ensemble tous les trois…»  Il offrit un peu de confiture au vieil homme, le prit sous les épaules, et fit signe à l’autre de l’aider. « Tu porteras aussi les outils ! » Le gamin, grogna mais ramassa la lourde hache de son compagnon la glissa dans son sac et souleva le vieux par les jambes.

 

 Le vieil homme se réchauffait un peu au contact des jeunes gens, il avait l’air de moins souffrir, mais il les ralentissait, leur faisait perdre l’équilibre. Sur le chemin tortueux ils glissaient, trébuchaient, manquaient le jeter à terre à chaque pas. Ils arrivèrent à un embranchement ; la route partait dans deux directions opposées. Devaient-ils aller à droite ou à gauche ? De hautes congères bouchaient la vue des deux côtés.

 « À gauche ! souffla le vieillard

– La pente qui monte est trop raide ! Pleine de neige gelée ! Facile pour toi qui te fais porter comme un prince ! grinça le plus jeune. Allons à droite, cela descend ! » Ce disant, il lâcha les jambes du vieux et se laissa glisser.

 Rien n’indiquait quel côté de la route serait le meilleur, mais sans savoir pourquoi, Sirki écouta le conseil du vieux. A bout de forces, il le hissa, le tira péniblement sur la glace. Il n’avait pas fait trois pas que derrière le mur de neige apparut une immense forêt, avec des arbres aux troncs massifs, aux branches vigoureuses. Du bois ! Il allait rapporter du bois !

 Le plus jeune qui ne voulait pas rester seul dans ce désert glacé avait finalement fait demi-tour et les avait rejoints essoufflé : « C’est bien beau cette forêt mais quelle force nous reste-t-il pour couper ne serait-ce qu’une seule branche ? Et comment rapporter le bois, nous sommes à plus de trois jours du village ? Jamais nous n’y arriverons ! » Sur ces paroles le gamin épuisé vacilla puis s’écroula sur Sirki qui tomba à son tour, lâchant le vieil homme, on entendit le crâne du vieux rebondir sur le sol dur.

 Découragés, ils ne tentèrent même pas de se relever…  C’est alors que d’une main où il manquait tous les doigts, le vieux frotta la bosse qui se formait sous son bonnet et chuchota : « Prenez ma scie, prenez mon sac. Sciez autant de bois que vous pouvez, rangez les bûches dans le sac pour les rapporter à votre village. Vous trouverez le moyen de rentrer. Je ne peux vous aider, vous le savez, je n’ai plus de mains, plus de pieds… »  Le vieil homme leur montra le sac de tissu noir épais, accroché à sa ceinture. Un sac à peine plus haut qu’une botte d’où ils sortirent une petite scie grande comme deux mains. Les garçons crurent qu’avec le froid, ses gelures aux mains et aux pieds et maintenant le coup sur la tête, le vieux avait perdu la raison. Ils se relevèrent, l’installèrent délicatement contre une congère, bien couvert de ses manteaux : « Oui, oui, Grand-Père nous allons d’abord faire un feu pour nous réchauffer, dormir un peu puis nous couperons le bois pour notre village. »  Pour lui faire plaisir, Sirki prit la scie, l’autre la hache et ils s’attaquèrent chacun à un arbre. Au contact du tronc, la petite scie s’emballa toute seule et débita une centaine de bûches avant même que la lourde hache ait porté deux coups. Sirki mit alors une bûche dans le sac, elle disparut, une deuxième, qui disparut aussi, une troisième qui disparut, le sac gardant toujours la modeste taille d’une botte. La scie et le sac étaient magiques ! Avec les fines branches, ils firent un grand feu pour se réchauffer. « Serais-tu magicien ou sorcier Grand-Père ? » Le vieil homme toussa et répondit seulement : « Dans votre village, quand vous aurez rangé toutes les bûches pour l’hiver, regardez au fond du sac, il y a un trésor pour vous. » Et à la chaleur des flammes, le vieil homme s’endormit le premier.

 Les garçons, affaiblis, éreintés, brisés, s’assoupirent à leur tour. Quand ils se réveillèrent quelques heures plus tard, le vieil homme était mort, blanc et raide comme une statue de marbre qui souriait.

 La terre était trop dure pour l’enterrer et ils n’avaient rien pour creuser, avec la scie magique ils débitèrent du bois et en recouvrirent son corps. Sirki prit soin de poser sur lui quelques tiges hivernales de bruyère rose .

 Ils coupèrent encore quelques arbres, rangèrent les lourdes bûches dans le sac magique où elles disparaissaient une à une. Soudain la scie refusa de continuer, alors ils se reposèrent près de leur feu de branchages ; ils léchèrent les dernières gouttes de confiture du dernier pot et prirent le chemin du retour.

 

 Ils portaient leur lourde hache, leur lourde scie et le sac du vieux, léger comme une botte vide. Le sol couvert de gel, l’air glacial, les petits flocons de neige piquants rendaient le chemin pénible. Parviendraient-ils jusqu’au village à plus de trois jours d’ici, dans ce froid sans rien manger ? Ils trébuchaient sans cesse, sous le vent leurs joues craquelaient, les fissures dessinaient comme des arbres morts sur leur peau et leur bouche aux lèvres fendues semblait un gouffre noir abritant la mort. Le village tout entier et la belle Hermine allaient mourir gelés attendant en vain leur retour… « Mon Hermine ! » soupirait Sirki. Alors qu’il retenait ses larmes de glace pour ne pas déchirer ses yeux, le village surgit soudain devant eux, ils avaient marché à peine trois heures !

 

 Le jour même, le bois fut distribué et rangé au village, et dès que les premiers feux dorés commencèrent à éveiller les habitants, Sirki malgré sa fatigue partit au château. Il avait gardé dans le sac du vieux quelques bûches. Son jeune compagnon de voyage tout aussi faible que lui le suivait en titubant « Ne crois pas garder le trésor du vieux pour toi seul Sirki ! Je ne te lâcherai pas ! »  Devant l’entrée du château ils firent fondre la glace avec quelques bûches. Lorsqu’enfin la porte s’ouvrit, elle grinça et résonna comme un cri de loup entre les murs glacés.

Dans la grande salle ils trouvèrent le Roi et la princesse Hermine, couverts de cent manteaux et de cent couvertures de fourrure, blottis l’un contre l’autre. De minuscules nuages de vapeur sortaient de leurs bouches : ils étaient vivants ! Froids, inertes, mais vivants ! Le jeune garçon qui accompagnait Sirki restait immobile devant la princesse endormie, émerveillé de tant de beauté, de tant de grâce, de tant de douceur.

 Du sac, Sirki sortit toutes les bûches qui restaient, en fit un tas dans la cheminée, puis il alluma un grand feu, les flammes montèrent jusqu’en haut de l’âtre, léchèrent les murs, réchauffèrent les pierres.

 Tandis qu’il attisait le feu, son compagnon prit une bûche et l’assomma.

 Puis il s’empara du sac de toile noire resté au sol «  À moi le trésor ! A moi la Princesse ! Jamais le Roi ne voudra qu’elle épouse Sirki ! Le misérable n’a pas de famille, pas un sou… Si je possède l’Or du vieillard et si je dis que j’ai ramené le bois et que je l’ai sauvée, c’est moi qu’elle épousera ! »  Du fond du sac, sa main retira une petite bourse de toile beige, grosse comme le poing, fermée par un cordon de cuir où était roulé un papier. Il la soupesa, la fit sauter dans sa main ; de petites boules comme des petits cailloux arrondis roulaient là-dedans. « Des pierres précieuses ! » rit le jeune garçon. De ses doigts gourds il déroula le papier : « Plantez ces graines, chacune espacée de trois mètres de la précédente, il poussera un bel arbre. Chaque fois que vous couperez un arbre plantez une graine. » Il entrouvrit la bourse et regarda ces grosses graines grisâtres, toutes sèches, rêches, ternes… Maudit sois-tu vieillard avec ton maudit trésor ! Il jeta la bourse à terre, prêt à pleurer et tête basse s’en retourna au village. Là au moins, tout à l’heure, il avait été accueilli comme un héros ! Fatigué, usé, tout son corps tremblait d’épuisement, ses pieds lourds et blessés le portaient à peine, son visage déchiré lui faisait mal, des paillettes lumineuses dansaient avec les flocons de neige devant ses yeux douloureux, le froid toujours présent pénétrait à nouveau sa peau, durcissait son sang…

 

 Au château, Sirki avait repris conscience et s’était aussitôt approché de la princesse Hermine, il caressait son beau visage, priant pour qu’elle se réveille. Son vil compagnon s’était enfui avec le sac du vieux et le trésor caché…Tant pis, l’important c’était Hermine ; il verrait plus tard comment retrouver ce maudit garçon.

 

 Ce dernier, sans force, se laissait malmener par le vent froid qui le poussait et lui déchirait la peau. Dans sa douleur il réalisa que c’était peut-être vraiment un trésor que leur avait laissé le vieux: s’ils avaient toujours des arbres plus jamais ils n’auraient à risquer leur vie, à souffrir comme ils avaient souffert pour un peu de bois. Il trébucha. Sur l’image d’une forêt verte, profonde, tiède et accueillante, il s’endormit de son dernier sommeil. À l’instant même, la Princesse ouvrit les yeux sous les mains de Sirki et lui sourit…

 

 Quand le Roi à son tour, sortit de son repos glacé, il ne pensa qu’à jeter dehors cet intrus sale, squelettique, en haillons qu’il trouva à côté de sa chère petite Hermine. Ce visage ravagé, mangé par des croûtes noires, la bouche déformée et craquelée l’écœuraient ! Et comble de l’horreur, ce monstre posait sans retenue ses mains crasseuses et crevassées, sur la Princesse ! Il voulut appeler ses gardes, mais de s’être tue si longtemps sa voix n’était plus qu’un chuchotement rauque. Sur ses jambes engourdies, flageolantes, il sortit furieux chercher les gardes, sans penser que depuis des semaines tous avaient dû périr de faim et de froid, n’ayant jamais été admis à l’abri des murs du château. Sur le parvis désert, le Roi dérapa sur le verglas, glissa, s’étala par terre et se cassa les deux jambes. « Aidez-moi ! Aidez-moi ! Donnez-moi de l’aide ! À moi ! » Trop faible sa voix enrayée ne parvenait pas à l’intérieur du château. Ni Sirki, ni Hermine ne l’entendit. Personne ne vint à son secours.

 « Aidez-moi ! Aidez-moi ! Donnez-moi de l’aide ! À moi ! ». Personne ne vint et en quelques minutes, cet hiver si cruel et si froid lui gela le cœur. Devant la porte de son palais, il mourut.

 Partant à sa recherche un peu plus tard, et le découvrant tout raide, la princesse n’en fut guère affectée. Son cœur de Roi avait toujours été glacé.

 

 Ce n’est que le lendemain que Sirki remarqua sur le sol, la bourse de toile qui avait roulé dans un coin de la pièce et le petit mot qui l’accompagnait « ...Chaque fois que vous couperez un arbre plantez une graine… » Il fit rouler dans ses mains les grains secs, il y en avait des longs, des ronds, des tordus, des fins comme des feuilles, des petits comme des grains de blé, certains lisses, d’autres rugueux… Il prit un manteau et des bottes de fourrure au château et retourna porter la bourse au village, laissant à regret, la princesse Hermine seule, au chaud entre les murs épais. Il lui promit de revenir très vite.

 Sur le chemin, il découvrit le corps bleui de son compagnon, un sourire tranquille sur son visage fissuré d’engelures…

 

 Au printemps, tout le monde planta les graines autour du village, tous les trois mètres, en cercle, sur dix rangées. Et chaque année, à chaque arbre coupé ils plantèrent une graine.

Ainsi firent-ils et depuis le village resta verdoyant, entouré de chênes, de hêtres, de noyers, de charmes, d’érables, de bouleaux, de peupliers… Et ils ne manquèrent plus jamais de bois pour leur feu.

 

 Quant à Sirki dont le visage retrouva vite sa beauté, il épousa la Princesse. Ils eurent beaucoup d’enfants et vécurent heureux au chaud, sans plus jamais se séparer. Sirki avait enfin une famille. Au printemps, il allait se promener avec ses enfants, leur apprenait à faire un herbier et ensemble ils regardaient les oiseaux voler dans les forêts alentour…


Concours2019

Prix jeunnesse Jacob et Willhelm Grimm décerné à Eva Bonnamy de Rosières près de Troyes.

La princesse et la paysanne

 

Il était une fois, une princesse nommée Lana, elle était très belle. Tellement belle que tous les princes voulaient l’épouser, malheureusement celle-ci avait un coeur de pierre.

Non loin du château, il y avait un petit village où vivait une paysanne du nom d’Elizabeth. Contrairement à Lana elle était hideuse mais avait un grand cœur.

Un jour, la princesse apprit une merveilleuse nouvelle, elle allait se fiancer au prince du royaume voisin, celui qu’elle aimait depuis tant d’années ! Pour fêter cela, et décida d’aller distribuer du pain au paysans du village, mais elle voulut donner plus ou moins de pain aux paysans en fonction de leur beauté.

Une fois au village, tous les paysans formèrent une fille indienne et se présentèrent en a un à la princesse, espérant recevoir un généreux morceau. Vint le tour d’Elizabeth. Celle-ci tendit les mains pour recevoir un bout de pain mais la princesse éclata de rire :

« tu crois sincèrement que tu mérites un morceau de pain ! Tu es tellement laide que je ne t’en donnerai même pas une miette ! S’exclama-t-elle méchamment .Je vous en prie princesse, ne soyez pas si cruelle. Supplia la paysanne.

Lana ne céda pas et refusa une nouvelle fois de donner du pain à la pauvre Elizabeth qui partit en pleurant, blessée et désemparée devant tant de méchanceté.

Une vieille grand-mère, qui observer la scène de loin, s’approcha et de la princesse :

« Toi qui a été égoïste envers cette pauvre enfant, je te maudits » dit la grand-mère.

Lana ne pas le temps de riposter que son visage s’était changé en celui d’un crapaud. Tous les paysans s’écartèrent d’elle dans un cri de terreur.

La princesse, ne s’étant rendue compte de rien, décida de rentrer au château mais elle remarqua bien vite que son visage avait changé car le prince, repoussé par tant de laideur, refusa de l’épouser ; elle se précipita vers un miroir et découvrit ce qui était désormais son apparence.

La princesse décida donc de retrouver la vieille dame qu’il avait maudite afin de redevenir celle qu’elle était avant. Elle retourna au village et la chercha, en vain. La princesse demanda à plusieurs villageois s’ils l’avaient vue mais ceux-ci  lui répondaient  sèchement en détournant le regard :

Je ne parle pas aux personnes laides ! Passez votre chemin !

En fin de journée, alors qu’elle se reposait au bord d’un puits, désespérée, elle vit une petite paysanne hideuse, la princesse la reconnut de suite : c’était la personne à qui elle avait refusé du pain avant que la grand-mère ne la maudisse.

« Ah ! Ma bonne fille, si j’avais su à quel point les gens étaient horribles avec les personnes comme vous, je vous aurais volontiers donné du pain ! Mais que voulez-vous, j’étais idiote et méchante à l’époque… Soupira-t-elle sincèrement, les yeux remplis de larmes. » À peine eut-elle prononcé ces mots que son visage avait retrouvé toute sa beauté d’autres fois.

« Il me semble que vous avez compris la leçon princesse, je vous rends donc votre beauté ! S’exclama la paysanne en souriant. » A ces mots, la princesse s’approcha  du puits et regarda son reflet dans l’eau. Quelle ne fut pas sa surprise ! Son visage ! Elle s’écria folle de joie : « mon dieu ! Mais est-ce de la magie ? Ou bien, était-ce le seul moyen pour me faire comprendre ma méchanceté et ma bêtise ? » Suite à cette mésaventure, Lana se jura de ne plus jamais juger les gens sur leur physique et devint une princesse juste est bonne, aimé par tous ces sujets.


Festival de la Vallée des Contes.

Concours “l’automne des conteurs” édition 2020.

Prix jeunesse “Jacob Wilhelm Grimm” décerné à Mademoiselle Céline Mudry.

 

L'étoile qui ne voulait pas briller

Sous une toile de ciel isolé et obscur

S'installe un groupe d'humains et de bêtes à fourrures En cercle et dans un rituel bien rodé, L’équipe se prépare à la grande veillée Pendant que les adultes composent un bouquet de flammes Les enfants chahutent dans un joyeux vacarme Mais quand l’aîné, de ses yeux, les invite au silence, Les jolis minois se taisent et observent la danse Des flammes gigantesques qui s'étirent jusqu'au ciel Des lueurs arabesques à la couleur de miel Les joues rosies, chacun se réjouit De découvrir sans tarder un nouveau récit Alors quand le rouge du feu Vient à teinter les cieux Le maître des histoires Plonge dans sa mémoire Annonce le titre du soir :

L'étoile qui ne voulait pas briller

« Ses copines la raillaient

Tu n'es qu'une fainéante

Et tout en chœur, elles criaient

Brille, brille, brille, petite étoile absente Petite étoile paresseuse Disaient les anciennes Et beaucoup trop rêveuse Déplorait la reine Brille, brille, brille, petite étoile fainéante Si ça ne tenait qu'à toi Le monde deviendrait froid Secoue-toi, réveille-toi, petite étoile bâillante Petite étoile boudait Briller la fatiguait Elle préférait nourrir Sa grande curiosité Depuis toujours elle s'intéressait Aux hommes qui à la nuit tombée Venaient au pied de leur tapis d'astres Raconter des histoires parfois fantasques Petite étoile se faufilait Discrètement, l'éclat caché Derrière les arbres de la forêt Ou dans la chaleur du brasier Espiègle, elle admirait parfois Les fantaisies des petits humains Leurs ritournelles, leurs danses de doigts Leurs grimaces malicieuses, leurs jeux malins Envieuse, elle rêvait À la magie de devenir quelqu'un Étoile incomprise Happée par la vie Étoile insoumise Qui jamais ne brille Une nuit, petite étoile fainéante fut convoquée Au bureau de la reine, dans les moindres délais Quand elle s'y rendit, c'était les yeux bien mouillés Sachant bien à quel sort elle serait constellée Rendue caillou dès la nuit levée Petite étoile fainéante tomba du ciel Au sol gisait une pierre abandonnée Rejetée des siens, coupée de ses ailes Un garçon qui flânait le long des allées Recueillit en ses mains petite pierre apeurée Lui chuchota des mots doux pour la rassurer Puis l'enveloppa de caresses pour la réchauffer

Tout doucement petite étoile commença à briller                                                                                     Et bientôt elle se mit même à frétiller

Soudain des doigts de l'humain elle s'échappa Rapide comme l'éclair, au ciel, elle grimpa Et quand parmi les siens elle réapparut À sa grande surprise, personne ne la reconnut Petite étoile fainéante se réinventa Tant son arrivée fut épatante et musclée Le respect de sa communauté elle gagna Une nouvelle étoile était née De concert, le ciel tout entier Lui attribua le nom enchanté De jolie étoile filée Et à chacune de ses traversées Spectaculaires et féeriques Elle épatait les Terriens Jolie étoile magique Peut-être en avez-vous déjà admiré Questionna, malicieux, le conteur Car pour nous elles n'ont plus de secret Les étoiles filantes portent bonheur Et dorénavant, vous regarderez différement Les pierres et galets qui ornent nos sentiers Plutôt que de les chasser d'un machinal coup de pied Pourquoi ne pas les aider à regagner le ciel pour l'allumer ? »

C'est ainsi que le sage acheva son récit Promettant à l'assitance de nouvelles péripéties Lors d'une veillée assurément éclairée Par une pluie d'étoiles lustrées.


Festival de la Vallée des Contes.

Concours “ l’automne des conteurs” édition 2020.

Prix adulte “Charles Perrault” décerné à Madame Dominique Rigel.

 

Le diable et le peintre

C’était au temps où le diable parcourait le monde à la recherche d’un héritier, il se faisait vieux, ses diablotins le traitaient de cacochyme, murmurant qu’il avait fait son temps et les complots allaient bon train. C’est pourquoi le pauvre diable voulait assurer son trône, une âme assez noire pour mettre de l’ordre dans ces hordes d’anges noirs, il pourrait alors prendre une retraite bien méritée, peut-être au fond d’un volcan, il y en avait pléthore sur la terre.

Madame la diablesse, son épouse et alter ego, n’avait jamais pu lui donner un enfant. Mais qu’aurait fait une âme aussi innocente que celle d’un bébé dans un endroit comme l’enfer ?

Le diable avait déjà emporté quelques âmes mais aucune ne s’avéra digne de lui succéder. Il commençait à désespérer des humains ! Mais la désespérance n’était-elle pas son lot ?

C’est alors qu’il pénétra dans la forêt des Vosges, il était fatigué de marcher, ses pieds de bouc lui faisaient un mal de chien, il s’assit sur une souche qui gémit sous son poids, les arbres aux alentours s’écartèrent de lui, il sentait le soufre et des fumerolles s’échappaient par tous les pores de sa peau, un incendie était si vitre arrivé !

Perdu dans ses rêveries, il n’entendit pas approcher un vieil homme et sursauta lorsque celui-ci lui adressa la parole.

- Bonjour brave homme, Dieu vous bénisse.

A ces mots, le diable eut une attaque cérébrale, s’il n’avait été immortel, il en serait mort sur place. Mais il se remit bien vite et examina l’homme, cette âme serait-elle digne de lui ? Mais il écarta cette pensée, l’homme ne lui semblait pas à la hauteur de cette tâche. Pourtant, ne voulant pas être moins poli, il le salua en retour, évitant de parler de son ennemi de toujours.

- Bien le bonjour vous soit donné, qu’est-ce qui vous amène en ces lieux ? Le vieil homme était aussi fatigué de sa longue marche et s’assit à côté du diable, apparemment son odeur pestilentielle ne paraissait pas le gêner. Il posa précautionneusement son havresac sur ses genoux.  Je suis bien aise de m’asseoir un moment, j’ai couru jusqu’ici car j’ai entendu dire que l’on allait pendre un grand criminel et je me hâte afin de le voir avant sa mort.

Le Diable en fut fort étonné, l’âme de ce vieil homme était-elle plus noire qu’il ne l’avait imaginé de prime abord ? Il commença à être intéressé, un grand criminel ? Tiens, tiens, ça faisait bien son affaire aussi, deux valent mieux qu’un !- Et donc… l’encouragea-t-il - Je suis peintre et il y a des années de cela, alors que ma renommée d’artiste grandissait, je reçus une commande d’un couvent pour peindre la vie de Jésus. Je découvris dans une chaumière un enfant tellement beau et gracieux qu’aussitôt je le pris pour modèle pour Jésus au milieu des docteurs. Je poursuivis la fresque et, arrivé à la scène du baiser de Judas, je m’arrêtai, où trouver un modèle pour peindre le traître ? Je voyageai de province en province, de pays en pays pour trouver le criminel assez dépravé pour être « mon » Judas. ..

- Et c’est alors que vous avez entendu parler de celui-ci, le Diable voulait en savoir plus. - Oui, c’est ma dernière chance, je suis vieux et n’aurai plus le courage de parcourir encore le monde.

- Allons de concert, mon cher ami !

Et bras dessus bras dessous, les deux compagnons s’enfoncèrent dans la forêt à la recherche du lieu de l’exécution. Des cris, des vociférations les attirèrent et dans une clairière, ils virent une potence dressée en son milieu et une foule haineuse rassemblée autour, un condamné arriva, monté sur une charrette. Au moment où on le faisait monter sur l’estrade, le peintre se précipita.

- Attendez, attendez !

La foule se tut et s’écarta devant le vieil homme hirsute et gesticulant, essoufflé d’avoir couru !

- Attendez encore un moment, dit-il en sortant un parchemin et un fusain de sa sacoche.

Tous s’arrêtèrent, bourreaux, condamné, foule, attendant des explications.

- Je suis peintre, il y de nombreuses années, j’ai peint la vie de Jésus, à la crèche puis à 12 ans et enfin adulte, mais pour le traître Judas, personne ne correspondait à ce que je voulais faire ressentir et j’ai parcouru le monde, j’ai rencontré beaucoup de criminels, d’êtres monstrueux mais aucun ne m’a satisfait et me voici. Cet homme est ma dernière chance, je l’ai bien regardé et je sais que c’est lui, « mon » Judas !

A ces mots, le Diable se frotta les mains, le voilà, son héritier, son fils spirituel, il n’avait plus qu’à attendre patiemment que la Mort fasse son oeuvre ! Il allait enfin prendre sa retraite, l’avenir de l’enfer était assuré. Il jubilait !

Au fur et à mesure que le peintre parlait, la figure du condamné se décomposait, des larmes coulèrent sur ses joues, puis des sanglots agitèrent tout son corps.

Tous se tournèrent vers lui, stupéfaits, ce criminel qui avait tué, volé, insulté ses juges, refusé les services d’un prêtre en jurant et blasphémant, le voilà qui pleurait ! On l’interrogea.

- L’enfant Jésus, si lumineux dans votre peinture, c’était moi ! Ma vie ensuite n’a été qu’un saccage, je le vois maintenant et j’en demande pardon. Je mérite ma punition, que Dieu ait pitié de mon âme.

A ces mots, le diable hurla de rage.

- Non, ce n’est pas possible, non, non… je suis maudit… Et il disparut dans un panache de fumée laissant une odeur de soufre.

Le visage du condamné s’apaisait et redevenait beau, lavé par les larmes, son coeur, longtemps emprisonné dans un cercle de fer se dilata. L’homme s’affaissa, mort, un sourire sur les lèvres, le silence se fit, un ange passait.


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